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ACHPR67 | Une étape vers une meilleure protection des droits des femmes africaines

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Au terme d’un processus qui a duré plus de six ans, la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples a élaboré l’observation générale n° 6 sur l’article 7 du Protocole de Maputo. Elle vise à assurer une meilleure protection des droits matrimoniaux des femmes et, notamment, du droit à un partage équitable des biens communs acquis durant le mariage.

Le samedi 14 novembre 2020, pendant la 67ème session ordinaire de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (la « Commission Africaine »), des expert.es reconnu.es des droits humains, des commissaires et des organisations de la société civile ont participé à une table ronde animée par le Président de la Commission Africaine, M. Solomon Ayele Dersso. Cette table ronde concernait l’observation générale n° 6 sur l’article 7 (d) du Protocole de Maputo, l’objectif étant de recueillir les réflexions de chacun.e des intervenant.es sur le processus de rédaction avant l’élaboration de l’observation générale.

La rédaction de cette observation générale a été établie par une résolution adoptée lors de la 24ème session extraordinaire qui s’est tenue à Banjul en 2018 et qui a donné mandat à la Rapporteure spéciale sur les droits des femmes de procéder à son élaboration avec la collaboration des parties prenantes concernées travaillant sur des questions de droits fonciers et de propriété.

L’article 7 (d) du Protocole stipule qu’en cas de séparation de corps, de divorce et d’annulation de mariage, les hommes et les femmes jouiront du droit au partage équitable des biens communs acquis durant le mariage. L’observation générale statue sur l’interprétation de la notion de partage équitable en tant qu’égalité réelle, qui exige que les États reconnaissent et assurent une protection dans des conditions d’égalité.

Étant donné que le Protocole de Maputo ne définit pas clairement la notion de partage équitable des biens communs, cette observation générale constitue un utile instrument de droit indicatif qui explicite la teneur des droits des femmes à la propriété en Afrique et donne des orientations pour leur mise en œuvre concrète.

« Les inégalités existent, tant dans la loi que dans la pratique, en particulier sur les questions de répartition des droits à la propriété. Ces inégalités persistantes et les pratiques et lois discriminatoires en matière de droit à la propriété sont d’ailleurs à l’origine de l’article 7 (d) », a expliqué Sylvia Noagbesenu, directrice exécutive de l’organisation IGED-Africa (Initiative for Gender Equality and Development in Africa).

Les participant.es à la table ronde ont souligné l’absence de protection des femmes en cas de divorce ou de séparation, notamment en cas de mariage coutumier ou de mariage islamique, d’où le besoin de reconnaissance de la contribution des femmes, en particulier à la tenue du foyer, même si elle n’est pas nécessairement financière.

Ils/Elles ont encouragé les États et la société civile à utiliser efficacement l’observation générale n° 6 en plaidant pour la promotion et la protection des droits des femmes en Afrique. Ils/Elles ont également rappelé l’obligation légale des États en vertu du Protocole, ainsi que la responsabilité collective, d’établir une norme à l’échelle du continent fondée sur les principes des droits humains.

« En tant que société civile, nous devons compléter les travaux de la Commission Africaine et sensibiliser toutes les parties prenantes à la teneur de l’obligation générale, la diffuser sous divers formats et la faire traduire en plusieurs langues afin de garantir qu’elle soit accessible à toutes et tous. Il est essentiel de la faire largement connaître. Les femmes risquent sinon de voir se perpétuer les violations de leurs droits à la propriété matrimoniale, en raison de leur méconnaissance de ces droits », a déclaré Patience Mungwari Mpani, représentante du Centre pour les droits de l’Homme de l’Université de Pretoria.

Les participant.es à la table ronde se sont dit honoré.es d’avoir participé à ce processus et de le voir porter ses fruits. Un petit nombre d’entre eux/elles ont toutefois rappelé que certains États qui avaient ratifié le Protocole de Maputo ne respectaient pas leurs obligations.

« Nous devons appeler les États à ratifier le Protocole de Maputo et à adopter les lois pertinentes pour sa mise en œuvre effective afin que les femmes de notre continent puissent en bénéficier », a déclaré la Commissaire Zainabo Sylvie Kayitesi, Rapporteure spéciale sur les droits des femmes en Afrique.

Contacts : Adélaïde Etong Kame, responsable du programme pour l’Afrique, [email protected]

Photo: Pickpik

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