Commission Africaine | Points clés de la 60ème session

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L’épidémie de virus Ébola, qui a touché récemment l’Afrique de l’Ouest, avait empêché le Gouvernement du Niger d’accueillir la 58ème session de la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (« Commission Africaine »). Cette année, après cette première tentative infructueuse, le pays a finalement pu accueillir la 60ème session ordinaire de cette instance, du 8 au 22 mai 2017 à Niamey, capitale du Niger. 

La session a été ouverte par Son Excellence Elhadj Issoufou Mahamadou, Président de la République du Niger. L’ordre du jour de la session ordinaire comptait approximativement 12 tables rondes, qui ont examiné certains des problèmes de droits humains rencontrés par le continent, ont fait le point sur ces problèmes et lancé des rapports et directives à leur sujet. Parmi les textes publiés figuraient les lignes directrices sur le maintien de l’ordre et la liberté de réunion, le projet de principes régissant la requalification et la dépénalisation des infractions mineures en Afrique et la 7ème édition de la lettre d’information Africa Torture Watch, pour n’en nommer que quelques-unes.

Pour la première fois, la Commission Africaine a débattu de rapports établis par le Mécanisme Africain d’Évaluation par les Pairs (MAEP) sur certains États. Lors de cette session, les rapports du Sénégal et de l’Ouganda ont été présentés à la Commission Africaine conformément au paragraphe 25 du document de base du MAEP, NEPAD/HSGIC/03-2003/APRM/MOU/Annex II, qui prévoit que, dans la cinquième et dernière étape du processus d’évaluation par les pairs, six mois après que le rapport a été examiné par les Chefs d’État et de Gouvernement des pays membres participants, il est officiellement et publiquement examiné par les principales structures régionales et sous-régionales, comme la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.

Le Mécanisme Africain d’Évaluation par les Pairs (MAEP) est un dispositif de contrôle réciproque. Il s’agit d’un instrument établi d’un commun accord, auquel les États Membres de l’Union Africaine (UA) adhèrent volontairement. Il a été créé en 2003.

Le MAEP a pour mandat de favoriser la conformité des politiques et pratiques des gouvernements africains avec les valeurs, codes et normes convenus en matière de gouvernance politique, économique et des entreprises. Il doit également encourager la réalisation des objectifs établis dans le domaine du développement socio-économique, qui s’inscrivent dans le cadre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique.

Parmi les autres questions débattues figuraient la situation des droits humains sur le continent. Les rapports des commissaires en charge d’un mandat spécifique ont également été examinés.

En dépit des progrès réalisés sur le continent en matière de promotion et de protection des droits humains, la persistance des conflits et de l’instabilité au Burundi, au Soudan du Sud et en République démocratique du Congo sape les efforts de paix et de stabilité sur le continent. L’adoption de lois restrictives par certains États parties a porté atteinte à la protection des droits humains. Les participants ont notamment fait état de leurs inquiétudes quant à l’adoption de lois antiterroristes, aux conséquences négatives sur la protection des droits humains dans les pays africains qui ont été, ou sont encore, la cible d’attaques terroristes.

À l’approche du 30ème anniversaire de la Commission Africaine, il convient de redoubler d’efforts afin d’identifier comment elle peut jouer un rôle plus décisif dans la prévention des conflits et de l’escalade des violations des droits humains. 

Le rapport périodique combiné de la Mauritanie a été le seul à être examiné lors de cette session ordinaire. Il l’a été en vertu de l’article 62 de la Charte Africaine, qui oblige les États parties à soumettre tous les deux ans un rapport périodique sur la mise en œuvre de ce texte au niveau national. Le gouvernement de la Mauritanie a présenté ses 10e, 11e, 12e, 13e et 14e rapports périodiques, couvrant la période 2006-2014 (http://www.achpr.org/fr/states/mauritania/reports/10th-14th-2006-2014/). Les préoccupations principales en matière de droits humains abordées au cours de l’examen du rapport sont présentées ici.

Résultats de la session

La Commission Africaine a octroyé le statut d’observateur à sept organisations non gouvernementales (ONG), amenant ainsi à 511 le nombre d’ONG dotées de ce statut. Le statut d’affilié a également été octroyé à la Commission des droits de l’Homme du Zimbabwe. Le nombre d’institutions nationales des droits humains affiliées à la Commission Africaine est ainsi passé à 27. Cette augmentation continue du nombre d’ONG disposant du statut d’observateur et d’institutions nationales des droits humains affiliées a été perçue comme le signe d’une bonne collaboration entre la Commission Africaine et ces parties prenantes, ainsi que de l’intérêt accru porté à ces travaux. Cette coopération fructueuse s’est également manifestée par l’augmentation du nombre de tables rondes organisées par les ONG avec les mécanismes spécifiques de la Commission Africaine. Plus de 12 tables rondes ont ainsi été organisées avant l’ouverture de la 60ème session.

Au total, la Commission Africaine a adopté 10 résolutions, toutes traitant de questions thématiques telles que le droit à la vie, la situation des défenseurs des droits humains en Afrique et la nécessité pour les États Membres de prendre des mesures législatives afin de protéger ces personnes.

La Commission Africaine a examiné 11 communications et, dans trois cas, a pris des mesures conservatoires. Le contenu des communications n’est pas encore disponible et sera publié lorsqu’une décision aura été prise[1].

Parmi les principaux documents adoptés, il est important de mentionner les lignes directrices sur la liberté d’association et de réunion en Afrique. Après un premier examen et un appel à contributions publiques, la Commission Africaine a finalement adopté ces lignes directrices, qui font suite au rapport du Groupe d’étude sur la liberté d’association et de réunion adopté en 2014[i].

Les lignes directrices donnent aux États parties et législateurs des orientations faisant autorité sur les mesures législatives et administratives à prendre pour garantir la jouissance des droits à la liberté d’association et de réunion. Pour les organisations de la société civile, ces directives sont un grand pas en avant et arrivent à point nommé, alors que certains États parties adoptent des lois antiterroristes visant à restreindre et supprimer l’espace civique.

 


[i] http://www.achpr.org/files/special-mechanisms/human-rights-defenders/rap….

 

Photo: ISHR – remise d’une copie de la loi type sur les défenseurs des droits humains à M. Marou Amadou, ministre de la Justice et des droits de l’Homme du Niger, par M. Clément N. Voulé

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