Commission Africaine | Célébration des défenseur.es et de l’universalité des droits humains

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Cette année marque les 70 ans de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et les 20 ans de la Déclaration de l’ONU sur les défenseur.es. À quelles réalisations ces déclarations ont-elles abouti en Afrique ? Quelle est la meilleure stratégie à adopter pour protéger efficacement les droits humains et leurs défenseur.es sur le continent ?

Dans le cadre de la 63èmesession de la Commission Africaine, deux tables rondes de haut niveau ont été organisées pour célébrer ces instruments. 

Lors de la table ronde organisée le 25 octobre 2018 et consacrée au 70ème anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et au bilan de sa mise en œuvre en Afrique, les participant.es ont évoqué les progrès accomplis dans la réalisation des droits humains et les obstacles que les gouvernements doivent encore surmonter pour garantir ces droits. Le débat a mené à une réflexion sur la stratégie à adopter à l’avenir. Que pouvons-nous faire de plus au cours des 70 prochaines années pour protéger les droits de toutes les Africaines et de tous les Africains ? Maya Fadel, Commissaire à la Commission Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples, et Clément Voule, Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit de réunion pacifique et d’association, assistaient à l’événement.

Les participant.es ont commencé par souligner l’importance du préambule de la Déclaration, proclamant que tous les peuples, toutes les nations et tous les individus doivent jouir des droits reconnus dans la Déclaration.  Ils/Elles ont ensuite cherché à savoir ce qu’il en était exactement aujourd’hui.

Les débats menés ont clairement établi que les populations d’Afrique n’avaient toujours pas la possibilité de jouir pleinement des droits humains. Certains pays sont encore en pleine transition politique. La violence, omniprésente dans certaines régions, rend quasiment impossible de garantir le droit à l’alimentation. Certains États ont toujours du mal à garantir pleinement les droits sociaux et économiques de leurs citoyen.nes.

Maya Fadel a souligné la spécificité du système régional africain. Même si la Charte Africaine inclut et reconnaît l’ensemble des droits garantis dans la Déclaration, elle intègre également la culture et les valeurs africaines dans la garantie de ces droits.  

La seconde table ronde, qui a eu lieu le lendemain, a permis d’examiner les réalisations et les perspectives vingt ans après la Déclaration de l’ONU sur les défenseur.es des droits humains (1998-2018) et cinq ans après la Résolution 68/181 sur les femmes défenseures des droits humains (2013-2018). Les participant.es ont évoqué le combat permanent mené par les défenseur.es en Afrique, et particulièrement les femmes, mais aussi les mesures prises par certains pays pour faire évoluer la situation et offrir un meilleur environnement de travail aux défenseur.es. Étaient notamment présent.es les Commissaires Remy Ngoy Lumbu et Lucy Asuagbor, ainsi qu’un.e représentant.e du Secrétariat d’État aux droits de l’Homme de Côte d’Ivoire.

À cette occasion, M. Ngoy Lumbu a présenté un nouvel outil, qu’il a développé en collaboration avec l’Université de Pretoria, répertoriant tous les instruments juridiques relatifs à la protection des défenseur.es des droits humains. Ce répertoire, qui inclut la Loi type élaborée par le Service International pour les Droits de l’Homme (sigle anglais ISHR) sur la promotion et la protection des défenseur.es des droits humains, est un moyen idéal de faire connaître ces instruments aux défenseur.es afin que ces dernier.es soient pleinement au fait de la protection à laquelle ils/elles ont droit en vertu des lois internationales, régionales et, parfois, nationales. 

La Commissaire Lucy Asuagbor, également Rapporteure spéciale de la Commission Africaine sur les droits de la femme, a rappelé les difficultés auxquelles les femmes font face lorsqu’elles tentent de défendre les droits humains, et notamment ceux des femmes. Elle a évoqué le problème de l’image que peuvent avoir les défenseures au sein de leur communauté lorsqu’elles œuvrent dans des domaines tels que les minorités sexuelles, la corruption ou les industries extractives. Les droits des femmes étant souvent en contradiction avec les croyances religieuses, les femmes qui luttent pour leurs droits peuvent être victimes de stigmatisation et de discrimination. Cette raison, à elle seule, justifie la nécessité d’offrir aux femmes une protection particulière.  

Le gouvernement de Côte d’Ivoire a ensuite présenté les avancées que le pays a pu réaliser en adoptant une loi nationale. Dans ce contexte, un.e représentant.e du gouvernement a déclaré qu’une nation qui cherchait à se développer ne pouvait y parvenir qu’en plaçant la protection des droits humains au premier plan et en assurant la protection de ses défenseur.es. Adoptée il y a maintenant 5 ans, la loi doit être évaluée et adaptée aux réalités du terrain.

Enfin, le/la représentant.e de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) a présenté les principales méthodes adoptées par l’organisation pour contribuer à mieux protéger les défenseur.es :

  • La diplomatie – discrète, constante et efficace
  • Le renforcement des capacités de la société civile – l’OIF finance différents projets menés par des défenseur.es partout dans le monde
  • La mobilisation de réseaux institutionnels de la Francophonie

En conclusion, M. Voule a constaté que la situation des défenseur.es soulevait désormais des préoccupations à l’échelle mondiale et qu’au fil des ans, leur travail gagnait en reconnaissance. Il reste toutefois encore beaucoup à faire au cours des vingt prochaines années pour garantir pleinement leur sécurité.

 

 

Contact: Africa Advocacy Consultant, Etong Kame Adélaïde, [email protected]

Photo: IMLU/Independent Medico Legal Unit

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