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Burundi | 44 ONG condamnent la peine de 32 ans de prison pour Germain Rukuki

Dans un pays où la dissidence est réprimée et les droits humains criminalisés, exiger le plein exercice des droits et libertés fondamentaux est une question de vie ou de mort. Une coalition de 44 ONG locales et internationales condamne fermement la confirmation en appel de la condamnation du défenseur des droits humains Germain Rukuki et demande sa libération immédiate et inconditionnelle.

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Le 17 juillet 2019, également Journée mondiale de la justice internationale, la Cour d’appel burundaise de Ntahangwa a confirmé la condamnation du défenseur des droits humains Germain Rukuki. La décision a été rendue dans le cadre d’une audience publique sans que Germain et sa défense aient été notifiés. Ils en ont finalement été informés le 22 juillet, soit six jours après que la décision ait été rendue.

Arrêté chez lui il y a deux ans, le 13 juillet 2017, et détenu depuis lors, Germain Rukuki a été condamné le 26 avril 2018 par la Haute Cour de Ntahangwa à 32 ans de prison pour “rébellion”, “atteinte à la sécurité de l’Etat”, “participation à un mouvement insurrectionnel” et “attentat contre le chef de l’Etat”. Il a fait appel de cette condamnation le 29 mai 2018. S’ajoutant aux nombreuses autres irrégularités procédurales qui ont affecté l’affaire, la décision en appel a été rendue plus de six mois après le délai légal.

C’est avec  une grande déception que j’apprends cette décision combien inique et triste. La Cour d’appel n’a pas examiné mon cas avec toute l’attention et la prudence qu’il méritait, mais a décidé de simplement confirmer le verdict du tribunal de première instance “, déclare Germain Rukuki aujourd’hui.

Malgré l’attention de la communauté internationale et la reconnaissance de l’engagement de Germain en faveur des droits humains, la décision du tribunal d’imposer un verdict sévère à Germain Rukuki reste une erreur judiciaire notable et le résultat d´une criminalisation illégale dont Germain fait l’objet depuis son arrestation en raison de ses activités passées de défenseur des droits humains avec l’organisation ACAT-Burundi. Ces poursuites exposent la manière dont lui et d’autres défenseur.es des droits humains au Burundi sont harcelé.es et pris.es pour cible par le système de justice pénale simplement parce qu’ils/elles exercent leur droit à défendre les droits humains. C’est aussi un exemple emblématique de la détermination politique continue des autorités burundaises à faire taire les défenseur.es des droits humains, ou toute source de dissidence, au Burundi.

La place de Germain n’est pas en prison. Il doit être libéré, proche de sa famille et de ses amis. Il faut reconnaître la légitimité de son travail en faveur de la justice sociale et de la protection des droits humains “, disent aujourd’hui les proches de Germain. 

Nous, les organisations non-gouvernementales soussignées, condamnons fermement la condamnation illégale de Germain et appelons les autorités burundaises à :

  • Respecter les normes internationales relatives aux droits humains, notamment le droit à un procès équitable, et annuler et réparer cette condamnation injuste en libérant Germain sans plus attendre et sans conditions 
  • Reconnaître la légitimité du travail des défenseur.es des droits humains et cesser de criminaliser les défenseur.es des droits humains au Burundi.

L’appui de la communauté internationale, des représentations diplomatiques au Burundi, de l’Union africaine et de la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples, ainsi que des dirigeants régionaux africains en particulier, demeure crucial à ce stade.

Nous exhortons donc la communauté internationale à :

  • Plaider pour la libération immédiate et sans conditions de Germain Rukuki 
  • Communiquer leur soutien et leur solidarité à Germain Rukuki et à sa famille 
  • Condamner publiquement les politiques de harcèlement, ainsi que les arrestations et détentions arbitraires des défenseur.es des droits humains au Burundi.

Presse : Pour toute question, veuillez contacter [email protected]  // +32 (0)2 609 44 09. 

 


Signataires :

  1. AfricanDefenders
  2. Amnesty International
  3. Association Européenne pour la défense des Droits de l’Homme (AEDH)
  4. Association Burundaise pour la Protection des Droits Humains et des Personnes Détenue (APRODH)
  5. Association des Journalistes Burundais en Exil (AJBE)
  6. Coalition burundaise des Défenseur·e·s de Droit Humains
  7. Coalition Burundaise pour la Cour Pénale Internationale (CB CPI)
  8. Collectif des Avocats pour la défense  des Victimes de Crimes de droit International commis au Burundi  (CAVIB)
  9. Coalition de la Société Civile pour le Monitoring Electoral (COSOME)
  10. DefendDefenders (East and Horn of Africa Human Rights Defenders Project)
  11. Consortium of Ethiopian Human Rights Organizations (CEHRO)
  12. Fédération internationale des ACAT (FIACAT) et les ACAT (Action des chrétiens pour l’abolition de la torture) suivantes:
  13. ACAT Burundi
  14. ACAT Bénin
  15. ACAT Congo (BZV)
  16. ACAT USA
  17. ACAT Suisse
  18. ACAT Allemagne
  19. ACAT République centrafricaine
  20. ACAT Belgique
  21. ACAT Espagne
  22. ACAT Luxembourg
  23. ACAT Madagascar
  24. ACAT Liberia
  25. ACAT Canada
  26. ACAT RDC
  27. ACAT Ghana
  28. ACAT France
  29. ACAT Italie
  30. Fédération Internationale pour les Droits humains (FIDH), dans le cadre de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme
  31. Forum Pour le Renforcement de la Société Civile (FORSC)
  32. Front Line Defenders
  33. International Service for Human Rights (ISHR)
  34. Ligue Burundaise des Droits de l’Homme Iteka
  35. Mouvement des femmes et filles pour la paix et la sécurité au Burundi (MFFPS)
  36. Mouvement Citoyen pour l’Avenir du Burundi (MCA Burundi)
  37. Observatoire de Lutte contre la Corruption et les Malversations Economiques (OLUCOME)
  38. Organisation mondiale contre la torture (OMCT), dans le cadre de l’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme
  39. Protection International
  40. Organisation pour la Transparence et la Gouvernance (OTRAG Burundi)
  41. Réseau des Citoyens Probes (RCP)
  42. SOS-Torture/Burundi
  43. Southern Africa Human Rights Defenders Network (SAHRDN)
  44. Union Burundaise des Journalistes

 


Chronologie des événements dans l’affaire du défenseur burundais des droits humains Germain Rukuki

2019

  • 17 juillet : la Cour d’appel de Ntahangwa rend sa décision sur l’affaire, confirmant la condamnation prononcée en première instance. La décision a été rendue dans le cadre d´une audience publique sans que Germain et son équipe de défense en soient informés. Ils n’ont été informés que le 22 juillet soit 6 jours après.
  • 31 mai : Une audience rapide a lieu à la Cour d’appel lors de laquelle les juges confirment la nomination de nouveaux juges compétents, ainsi que le nouveau délai pour la décision d’appel (28 juin). Le dossier perdu semble finalement avoir été retrouvé, sans plus de détails sur sa disparition et sa récupération.
  • 27 mars : Le porte-parole de la Cour suprême du Burundi informe les médias locaux que le dossier judiciaire de Germain a été égaré lors de la restructuration de la Cour d’appel de Bujumbura. La perte du dossier s’ajoute à de nombreuses autres irrégularités procédurales qui ont affecté l’affaire.

2018

  • 26 novembre : L’audience en appel a lieu devant la Cour d’appel de Bujumbura. Un délai de 30 jours est accordé pour que la décision d’appel soit rendue. Ce délai n’est pas respecté.
  • 5 juillet : La sous-commission des droits de l’homme (DROI) du Parlement européen demande la libération immédiate de Germain lors d’une résolution d’urgence sur la situation des droits humains au Burundi.
  • 26 juin : Il demande une libération sous caution pour des raisons médicales et humanitaires. Aucune réponse n’a été donnée à ce jour.
  • 18 juin : Germain est transféré à la prison de Ngozi bien qu’il soit toujours dans un état critique.
  • 11 juin : Germain subit une opération chirurgicale à l’hôpital de Ngozi après s’être fracturé la cheville en prison.
  • 29 mai : Germain fait appel de sa condamnation.
  • 16 mai : Le président de la sous-commission des droits de l’homme (DROI) du Parlement européen, Pier Antonio Panzeri, appelle les autorités à libérer Germain.
  • 8 mai : La Haute Représentante Mogherini fait une déclaration au nom de l’UE dans laquelle elle mentionne spécifiquement le cas de Germain Rukuki dans le contexte des préoccupations plus larges en matière de droits humains dans ce pays.
  • 26 avril : Germain est condamné à 32 ans de prison par la Haute Cour de Ntahangwa pour “rébellion”, “menace à la sécurité de l’Etat”, ” attentat contre le chef de l’Etat ” et “participation à un mouvement insurrectionnel”. Germain est acquitté pour “assassinat” et “destruction de bâtiments publics et privés”. Ni Germain ni ses avocats ne sont présents lors de la lecture du verdict.
  • 3 avril : La deuxième audience a lieu devant la Haute Cour de Ntahangwa. L’accusation ne parvient pas à présenter de preuves concrètes et convaincantes lors des deux procès.
  • 13 février : La première audience a lieu devant la Haute Cour de Ntahangwa. Trois chefs d’accusation supplémentaires d'”assassinat”, de “destruction de bâtiments publics et privés” et de “participation à un mouvement insurrectionnel” sont ajoutés.

2017 

  • 25 août : Des experts de l’ONU demandent la libération du défenseur burundais des droits humains Germain Rukuki.
  • 21 août : La Cour confirme sa détention provisoire.
  • 1er août : Il est accusé d’ “atteinte à la sécurité intérieure de l’État” et de “rébellion” par le Tribunal de première instance de Ntahangwa au Burundi, en raison de son travail avec l’ONG ACAT-Burundi.
  • 26 juillet : Germain est transféré à la prison de Ngozi.
  • 13 juillet : Germain Rukuki est arrêté à son domicile et conduit dans les locaux du Service National de Renseignement (SNR). Il est détenu et interrogé sans la présence d’un avocat.

 

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